Interview avec Peter Magauer, directeur général, Andritz Hydro, Ravensburg, Allemagne

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SenGermany : Nous nous réjouissons beaucoup de vous avoir comme orateur au 3ème sommet économique Allemagne-Sénégal du 4 novembre 2016 à Duisburg. Mais vous avez participez du 10 au 12 octobre à la conférence et au Salon international « Hydro 2016 » à Montreux en Suisse où vous vous êtes entretenu avec des experts africains et notamment sénégalais. Pouvez-vous nous donnez plus précisions sur cet évènement ?

 

Peter Magauer : Bien volontiers. Mais je me réjouis d’abord d’avoir été invité au 3ème sommet Allemagne-Sénégal parce que nous avons placé l’Afrique au centre de nos intérêts. Nous faisons partie des plus grands fournisseurs d’équipements pour les installations hydro-électriques, construisons des turbines et des groupes électrogènes avec tous les éléments mais sur notre site de Ravensburg, notre équipe s’occupe et construit l’importante partie des turbines et ceci à partir de la planification, de l’ingénierie jusqu’au montage.

SenGermany : Est-ce que la production que vous faites à Ravensburg était un thème majeur à Montreux ?


Peter Magauer :
La conférence de Montreux est axée sur la technique et moi-même, je suis un technicien qui aime beaucoup bouger dans ce domaine et m’entretenir avec des experts. La conférence HYDRO 2016 qui s’est tenue à Montreux est la plus grande conférence qui ne s’occupe que d’énergie hydro-électrique. Cette année, il y avait 1 400 participants qui viennent tous du monde hydro-électrique. Cela va des instituts universitaires aux clients qui construisent et exploitent des barrages électriques, aux fournisseurs de systèmes comme nous ou aux fournisseurs de composants et c’est toujours un échange animé et fructueux. Ceci est aussi valable pour les visiteurs africains qui apprécient beaucoup cette conférence qui leur offre cette combinaison de solides compétences techniques, de contacts tout comme de réseaux.

SenGermany : Vos activités se concentrent dans quels pays africains ?


Peter Magauer :
En Afrique, nous sommes surtout dans la partie australe et à l’Est. Notre plus grand projet se trouve en Angola. Il s’agit d’un barrage de 2 100 MW pour lequel nous fournissons les turbines. Nous nous occupons aussi de la restauration du barrage Inga II en République Démocratique du Congo. Nous avons plusieurs contrats pour de petites unités en Afrique de l’Est. Notre équipe qui se trouve actuellement au Rwanda est en train de négocier une offre pour laquelle nous avons bon espoir de signer le contrat sous peu de temps. Tout cela pour vous dire que cette région nous tient en haleine.

SenGermany : Vous parlez de l’Afrique australe et de l’Est. L’Afrique de l’Ouest est-elle zone blanche sur votre carte d’Afrique ?


Peter Magauer :
L’Afrique de l’Ouest ne nous est pas inconnue. Mais nos projets n’y sont pas ou pas encore aussi intenses. Nous nous occupons de la restauration des installations du barrage de Manantali au Mail pas loin de sa frontière avec le Sénégal où nous réagissons aux changements des conditions de production auxquelles nous adaptons les machines.

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Barrage de Manantali (Mali) avec des turbines Andritz Hydro, Ravensburg (Allemagne)


SenGermany : Pouvez-vous approfondir vos propos. Y avait-il des anomalies dans le fonctionnement des installations à Manantali ? 


Peter Magauer :
Les installations fonctionnaient bien mais les critères de dimensionnement ou plutôt les critères selon lesquels les installations doivent être construites et exploitées ont changés. A l’époque où nous avions gagné le projet dans les années 90, les installations étaient axées sur le système du fil de l’eau avec un système d’exploitation basé sur une activité constante avec peu de mouvement de régulation. Ce qui fait que les turbines Kaplan étaient dimensionnées sur la base d’une très haute chute d’eau accompagnée d’une forte pression sur les hélices. Il est question de sept hélices qui doivent être placées dans un petit espace afin que les critères de dimensionnement jouent un rôle important. Et nous avons construit l’emplacement de telle sorte qu’il résiste à la charge statique normale et au mode de fonctionnement qui étaient décrits dans l’appel d’offres. En résumé, les machines n’avaient aucun problème tant qu’elles étaient exploitées de manière conventionnelle avec peu de variation de charge.

SenGermany : Quelles sont les raisons des réparations que vous faites en ce moment ?


Peter Magauer : 
 La dynamique du réseau a changé du fait de la prise en compte des nouvelles énergies renouvelables et de la réduction des capacités de stockage. Les barrages hydro-électriques ont de plus en plus la charge de réguler et de stabiliser le réseau afin que la fréquence reste constante et que les appareils fonctionnent bien jusqu’au bout du système. C’est ainsi qu’on réduit au plus bas le danger des coupures électriques. Ce qui veut donc dire que le rôle des barrages hydro-électriques a évolué dans de nombreux cas, de la simple production d’énergie à la régulation et à la stabilisation du réseau. Cela fonctionne avec les mêmes installations mais seulement si on change quelques petits détails. Et quand le premier rotor a subi de fortes dégradations, nous l’avons examiné et fait des propositions à savoir comment adapter la construction en redimensionnant des pièces importantes des machines.

SenGermany : 
Combien de temps vont durer ces travaux de réparation ?
Peter Magauer : On a défini un planning de changement total. Et pour de tels travaux de reconstruction, il n’est pas nécessaire de changer toutes les machines en même temps. Quand il s’agit d’une nouvelle construction, il nous faut en général un intervalle de trois mois. Ce qui veut dire qu’on installe une machine tous les trois mois. Dans un tel cas, c’est deux machines par année et dans certains cas une par an. Pour Manantali, nous avons proposé deux machines par an parce qu’on veut terminer les travaux de reconstruction rapidement. Nous avons déjà opéré à deux changements. Il en reste encore deux ; ce qui va sûrement durer encore deux ans jusqu’à la fin des travaux.

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Couvercle intérieur d’une turbine Kaplan, barrage de Manantali (Mali)


SenGermany : A quelle date avez-vous commencé les travaux ?


Peter Magauer : Il y a environ deux ans. Pour rappel, nous avons d’abord fait l’état des lieux, ébaucher un design et pour cela il a fallu prendre des dimensions précises. Ensuite, nous avons commandé le matériel. C’est une fonte spéciale à partir d’acier moulé, inoxydable et d’une très haute résistance. Selon la dimension des pièces, nous les recevons seulement huit ou dix mois après la commande. Ensuite nous passons à la soudure, à l’usinage et à l’assemblage qui dure six mois et ensuite, il faut deux bons mois pour l’expédition des machines jusqu’au chantier. Après cela, le montage dure cinq à six mois. Ainsi, il faut compter sur une durée de contrat de trois ans pour une seule machine. Et pour des travaux de reconstruction, il est important de savoir combien de temps la machine est à l’arrêt. Pour de grandes installations, cela peut durer une bonne année pendant laquelle il n’y a pas de production électrique.

SenGermany : Quel est le personnel dont vous disposez sur place ?


Peter Magauer : Nous avons trois à quatre collaborateurs sur place et avons toujours travaillé avec un partenaire qui est chargé du montage et qui nous fournit du personnel : ajusteurs, soudeurs et électriciens. Et nous disposons dans la mesure du possible de personnel local. Par principe, nous veillons toujours à savoir quelle est la qualification du personnel local. Nos grands projets sont toujours combinés avec un programme de formation. Pour le projet en Angola, il a été prévu un centre de formation qui va être construit par l’entreprise de construction. Nous dispensons des cours pendant trois ans afin de transmettre une qualification spécifique qui permet à notre client de disposer de plus d’ouvriers spécialisés plus tard.

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Atelier de formation dans l’enceinte du site d’Andritz Hydro à Ravensburg (Allemagne)

SenGermany : Faites-vous aussi de la formation actuellement au Mali ?


Peter Magauer :
C’est une petite commande pour laquelle une courte formation est prévue pour faire marcher les installations. Mais nous sommes aussi en mesure de proposer des formations ; ce que nous proposons de temps en temps comme un service-maison à moins que cela soit dans le cadre de grands projets.

SenGermany : Revenons-en à la conférence Hydro 2016 de Montreux qui est la plus grande manifestation du genre en Europe dans le domaine hydro-électrique. Avez-vous eu le temps de discuter avec des experts sénégalais ?


Peter Magauer :
Oui, bien sûr ! Et ceci rien que pour l’intérêt que je porte à la technique et aussi pour nos marchés et nos clients. Mais aussi surtout parce que plusieurs clients africains dont ceux de l’OMVS (Organisation de la mise en valeur du fleuve Sénégal) et de l’OMVG (Organisation de la mise en valeur du fleuve Gambie), les deux fleuves en Afrique de l’Ouest, dirigées par des entreprises de plusieurs Etats qui ont aussi des projets. C’est naturellement intéressant parce que plusieurs projets sont en vue.

SenGermany : Quels sont les concurrents que vous rencontrez sur le marché africain ?


Peter Magauer :
Nous les Européens, sommes confrontés au problème ou au défi de la prédominance chinoise en Afrique. Et la Chine arrive souvent avec des solutions globales comprenant le financement, la construction et les machines. Nous apprenons de nos clients que cela marche de temps à autre mais pas toujours et que le respect des délais de livraison n’est pas toujours respecté. A Ravensburg, nous construisons des turbines depuis 160 ans : nous fabriquons du début 1856 à nos jours des turbines à eau et avons 460 employés qui maîtrisent le travail du bas de l’échelle. Près d’un employé sur deux est un ingénieur. Et les pays émergents comme la Chine ne sont pas encore habitués à de bonnes normes de production et ne disposent pas de cette immense expérience.

SenGermany : Très bien mais vous dites que les Chinois arrivent avec des solutions globales. Ce qui veut dire que l’Etat les soutient. Vous concernant, ni le gouvernement allemand ni le gouvernement autrichien vous soutient. Etes-vous en mesure de concurrencer les Chinois dans de telles conditions ?


Peter Magauer :
Pas toujours. Mais il y a des exemples qui marchent. Nous constatons aussi que le gouvernement allemand nous soutient de plus en plus. Même si le mot « soutien » est un peu exagéré, sa manière de considérer l’Afrique a changé. Il y a encore quelques années de cela, nous n’avons vu du gouvernement allemand que des projets sociaux et de décentralisation de l’agriculture surtout quand je pense au ministère de la coopération économique et du développement. Ceux sont des activités qui sont certes importantes mais à mon avis, on an sous-estimé les thèmes tels que les infrastructures, l’énergie et le transport. Je me déplace beaucoup en Afrique depuis ces dernières années et peu importe là où vous êtes ; au Caire, à Luanda ou à Kinshasa, les villes étouffent dans la circulation. A Luanda, il y a à chaque coin de rue des groupes qui marchent au diesel pour une production minimale d’électricité. Le ramassage des ordures ménagères fonctionne à peine. Concernant l’eau et les eaux usées, il y a un énorme retard à combler et six millions d’habitants y vivent. C’est un problème que nous avons ignoré ou sous-estimé pendant longtemps en Allemagne. Et je pense que c’est seulement maintenant que nous y sommes confrontés à cause de la crise migratoire et des réfugiés et pensons qu’il faut faire quelque chose dans le domaine du développement des infrastructures.

SenGermany : Que voudriez-vous conseiller au gouvernement allemand ?


Peter Magauer :
Il faudrait que nous fassions plus de projets européens et en toute logique sous l’égide de l’Allemagne. L’Allemagne peut jouer le rôle de locomotive et nous avons de bons partenaires en France et naturellement en Autriche et aussi, car chaque fois que nous fabriquons des turbines ici, nous y joignons des groupes électrogènes d’Autriche. De plus, je vois encore plus de possibilités concernant des alliances diverses en Europe et j’aimerais en voir beaucoup plus afin que nous prenions position face aux Chinois comme alternative européenne. 

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Le rotor Francis du barrage Guri II fournit la moitié du Venezuela en électricité

 
SenGermany : Que fait le fonds d’assurance-crédit Euler Hermes ?


Peter Magauer :
C’est là où je voulais en venir. Nous observons une évolution qui avance petit à petit dans le bon sens. Ces dernières années, de plus en plus de pays ont été éligibles et obtiennent déjà une garantie de risque à l’exportation de la part d’Euler Hermes. Il y a juste un mois, Euler Hermes a annoncé que la Côte d’Ivoire et le Rwanda sont éligibles et le Sénégal fait partie de la liste depuis quelques mois. Si nous fabriquons des machines avec un certain pourcentage de production en Allemagne et de telle sorte qu’une grande partie du travail soit exécutée ici, dans ce cas nous pouvons faire une demande de garantie pour les machines et devrions aussi l’obtenir pour le Sénégal. Ce qui veut dire que pour ce cas précis, qu’une banque peut financer la partie qui représente notre machine dans le cadre d’un financement global ce qui est très attractif pour le client.

SenGermany : Une banque allemande par exemple ?


Peter Magauer :
Oui, une banque allemande ou une banque qui entretient une succursale en Allemagne. Le problème ne se situe pas au niveau de l’argent. Il y a assez d’argent disponible et nos projets sont une belle opportunité d’investir de l’argent à long terme. Un barrage hydro-électrique représente toujours un énorme investissement avec une longue période de remboursement. C’est seulement après 15, 20, 25 et parfois 30 années que les investissements sont remboursés. Mais nos machines sont faites pour être exploitées pendant 40 à 50 ans. Et après ces 50 années, on les modernise comme par exemple avec de nouveaux rotors et c’est repartit pour encore 50 années. Et si les investissements sont remboursés, les coûts d’exploitations sont bas et les barrages hydro-électriques déjà amortis deviennent les meilleures sources de revenus pour nos clients.

SenGermany : Vous avez cité plusieurs projets qui sont en vue en Afrique. En avez-vous identifiés en Afrique de l’Ouest ?


Peter Magauer :
Nous avons déjà vu qu’en Guinée par exemple, les deux premiers projets ont été construits par des entreprises chinoises. Nous n’avions pas soumissionné en son temps parce que nous n’étions pas en mesure de faire une offre attractive. Même si Andritz Hydro est l’un des trois plus grands constructeurs de turbines du monde et que nous sommes en mesure, avec les autres firmes du groupe, de proposer tout ce qui concerne les équipements, nous ne pouvons pas couvrir la construction. Et environ les deux-tiers d’une installation et parfois même 70 à 80% de celle-ci sont des travaux de construction. C’est un autre monde qui nécessite un savoir-faire approprié. Il faut tenir compte de facteurs tels que la géologie que nous ne maîtrisons pas. Et au moins pour un projet global, Il faut combiner la construction et les équipements. Il faut aussi un planificateur qui coordonne le tout. Ensuite, il faut une banque qui le finance. Il faut ces quatre parties. Et l’avantage de la Chine est que tout ceci est dirigé de manière centralisée. Voilà la raison pour laquelle il leur est plus facile de ficeler un projet global.

SenGermany : Cela signifie-t-il que vous n’avez aucune chance contre la Chine ?


Peter Magauer :
Dans certains cas, nous nous allions avec une entreprise de construction. Il nous arrive par exemple d’être sous-traitant d’une entreprise de construction française, allemande ou autrichienne. Mais c’est très difficile. Dans les autres pays, il y a plus d’entreprises de construction qu’il n’y a de fournisseurs de machines et pour une telle collaboration, il est très difficile de faire le choix du partenaire approprié pour la construction. J’en ai parlé à de multiples occasions et même avec des chefs d’Etat africains en leur proposant que pour la rentabilité du projet, il serait plus judicieux de faire deux offres ; une pour les machines et une autre pour la construction. Et pour cela, il existe des mécanismes qui ont pour but de définir le planning, les listes de recoupement et les accords afin qu’il n’y ait une seule structure de coordination pour la réalisation des deux offres.

SenGermany : A Quelles entreprises de construction allemandes pensez-vous pour ce genre de grands projets ?


Peter Magauer :
Malheureusement, nous observons un tarissement des entreprises de construction en Allemagne. Ceci est la raison pour laquelle nous faisons volontiers appel à des entreprises non allemandes en Europe aussi parce que nous pouvons coopérer avec une entreprise française qui fait appel à la Coface. Pour les turbines, nous obtenons la garantie d’Euler Hermes et pour la partie électrique la garantie de la banque d’assurance-crédit autrichienne (ÖKB).

SenGermany : Au début, vous avez parlé de nouveaux défis auxquels vous faites face y compris les entreprises qui construisent des barrages hydro-électriques. A cause du fait qu’on utilise de plus en plus d’énergies renouvelables dans le monde, vous êtes confrontés à de nouvelles réglementations. Pouvez-vous nous expliquer ces défis.


Peter Magauer :
Quand on commence par le dimensionnement d’une turbine, il nous faut toujours savoir sur quels critères on se base. Les critères classiques sont les suivants : rendement et hauteur de chute. Mais ce qui devient de plus en plus important est la zone d’intervention : combien de temps opère-t-on en charge partielle ? Quand on veut réguler le réseau, on ne fait pas marcher une machine de 100 MW sur 100 ou 90 MW mais souvent sur 50 MW. Malheureusement, une turbine Francis opérant avec 50% de son rendement fait un bruit assourdissant. Et ceci peut endommager la machine si ce n’est pas prévu. Si vous éteignez la machine et la remettez en marche tout de suite après, elle consomme beaucoup plus de sa longévité que pour des centaines d’heures d’activité. Voilà pourquoi il nous faut savoir combien de fois ceci est prévu. Nous sommes actuellement en mesure de calculer la mise à l’épreuve des pièces d’une machine à l’aide d’une méthode dynamique et si ce calcul est possible, on doit aussi pouvoir faire une conception des éléments afin qu’ils tiennent 50 ans.

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Une turbine Francis d‘Andritz Hydro destinée au barrage Inga II en République démocratique du Congo

 
SenGermany : Lors de mon interview avec Monsieur Michael Vehinger, chef du département Afrique de l’Ouest à la KfW, il m’avait parlé de la combinaison entre les barrages hydro-électriques et les énergies éolienne et solaire. Où vous placez-vous dans cet encrage ?


Peter Magauer :
Je suis convaincu et je m’exprime en mon nom propre et au nom de notre entreprise, que les scénarios énergétiques futurs s’appuieront principalement sur les énergies renouvelables. Et dans ce cadre, l’énergie hydro-électrique sera logiquement un pilier dans les énergies renouvelables et qu’on pourra la combiner avec les énergies éolienne et solaire parce qu’on peut réguler l’énergie hydro-électrique quand on dispose d’une capacité de stockage suffisante. Nous faisons actuellement des essais en Afrique en combinant l’énergie hydro-électrique et la photovoltaïque. C’est très attractif car on utilise l’énergie solaire pendant la journée en stockant l’eau. Et le soir, on met en marche les turbines à eau quand les besoins augmentent et que le soleil se couche.

SenGermany : Vous êtes un technicien. Pouvez-vous nous décliner votre parcours professionnel ?


Peter Magauer :
J’étais étudiant en génie mécanique à Graz en Autriche et travaille depuis 1982 dans l’entreprise qui s’appelle Andritz actuellement puisqu’il y eu un regroupement de plusieurs entreprises. Je travaille depuis 1987 dans le service technico-commercial dans le même groupe d’entreprises. Il n’y a que la raison sociale qui a changé. J’étais de 1982 à 1997 à Linz en Autriche chez Voest Alpine VA-Tech. A l’époque, nous fabriquions de très bonnes turbines pour des hauteurs de chute basses mais nous n’étions pas très bons dans le domaine des chutes hautes. Ensuite, on a pris le contrôle d’une entreprise à Vevey près du lac de Genève qui était numéro deux en Suisse dans la maîtrise des turbines pour chutes hautes. Escher-Wyss, sise Zurich, était le numéro un. En 1997, j’ai été affecté à Vevey pour rapprocher la succursale à la maison-mère et aussi pour le transfert de la technologie de la basse pression d’Autriche en Suisse et de la haute pression de la Suisse en Autriche.

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Peter Magauer, ingénieur en génie mécanique et Directeur général d‘Andritz Hydro devant son bureau à Ravensburg (Allemagne)


SenGermany : Depuis quelle date êtes-vous en poste en Allemagne ?


Peter Magauer :
Je travaille depuis 2000 chez Andritz à Ravensburg à la suite du regroupement des entreprises. Dans les années 1999/2000, la maison-mère autrichienne a racheté Sulzer-Escher Wyss. Escher Wyss était à l’époque notre principal concurrent qui après, nous a rejoint. Ravensburg était déjà à l’époque le site de production des grandes installations d’Escher Wyss. On fabriquait à l’époque une bonne part en Suisse mais concernant les grandes installations, la compétence se trouvait en Allemagne et nos ateliers étaient déjà très importants. C’est dans le cadre du regroupement de ces entreprises qu’on m’a demandé d’aller à Ravensburg pour la bonne et simple raison que j’ai toujours était actif dans le domaine des grandes installations et en Suisse, on voulait se spécialiser dans les services et les petits projets.

SenGermany : Quels sont vos concurrents dans votre branche ?


Peter Magauer :
En observant le marché mondial des installations hydrauliques, vous constaterez que nous sommes une très petite branche comparée aux autres industries. Pour vous donner un ordre de grandeur, le chiffre d’affaires mondial annuel est d’environ cinq milliards d’euro, des fois un peu plus, dans le domaine des turbines et des groupes électrogènes et ceci est dû en grande partie à la longévité des machines. Dès qu’un barrage est construit et qu’on livre les machines, c’est parti pour 50 ans. C’est la raison pour laquelle les volumes ne sont pas importants. Les trois leadeurs mondiaux ont leur siège en Europe. Il s’agit de Voith, Andritz et d’Alstom en France qui a été racheté par General Electric (GE). Chez GE, la maison-mère se trouve aux USA mais la responsabilité de l’hydro-électrique est restée en France. Mais je pense que comparés aux autres, nous avons maintenu notre force en Europe afin de bien y fournir des services. Nous sommes aussi d’avis que le savoir-faire et l’ingénierie dans le domaine des projets complexes sont toujours très bons en Europe. Quand nos concurrents ont préféré mettre l’accent en Asie, notre philosophie est restée la suivante : « développer l’Asie mais maintenir une Europe forte. »

SenGermany : Mais vous avez une succursale en Chine malgré la concurrence chinoise ?


Peter Magauer :
C’est exact ! Nous avons une entreprise qui entretien trois sites en Chine. Nous fabriquons des installations complètes à Beijing et y faisons de l’ingénierie. Nous produisons aussi à Chengdu dans le cadre d’une joint-venture et Andritz a aussi une fonderie à Fonshan. Nous sommes bien équipés en Chine mais les grands projets transfrontaliers sont dirigés à partir de l’Europe et une grande partie des éléments viennent de Chine pour des raisons de coûts. Ceci dit, les éléments complexes sont fabriqués chez nous en Allemagne. Ce qui fait que nous sommes en mesure de garantir la meilleure qualité avec un traitement professionnel grâce à une telle combinaison.

Monsieur Magauer, merci pour cet entretien.

Propos recueillis par Ibrahim Guèye

 

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